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Historique

UN SITE EXCEPTIONNEL D’EPOQUE AUGUSTEENNE

UN SITE EXCEPTIONNEL D’EPOQUE AUGUSTEENNE

Le quartier du Clos-de-Serre se trouve à l'ouest de la partie agglomérée du village actuel de Caumont-sur-Durance. La terrasse villafranchienne de la rive gauche du Rhône descend ici en pente douce vers la vallée de la Durance et entoure des affleurements de molasse burdigalienne, posés sur des argiles : c'est le cas du petit plateau appelé le Clos-de-Serre, cependant qu’un autre petit plateau porte au nord la chapelle Saint-Symphorien. Vers l'est s'étend la plaine alluviale du Comtat. C'est au point de rencontre de ces reliefs que s'est installée, sur le plateau du Clos-de-Serre, une riche villa d'époque impériale. De cette éminence on retombe en direction du sud par trois niveaux successifs jusqu'au niveau du lit majeur de la Durance, qui coule aujourd’hui à environ 1200 mètres de là. A l’époque romaine la rivière était beaucoup plus proche, et venait sans doute lécher le pied de la basse terrasse. Sur cette dernière (niveau moyen 55 m NGF), au sud-est du Clos-de-Serre, a été découvert en 1999 un jardin d'agrément lié à la villa. De nombreuses trouvailles de surface (céramiques diverses, monnaies…) avaient attiré l'attention des archéologues, parmi lesquels, en dernier, Pierre Broise qui avait émis l'hypothèse de l'existence d'un vicus (Broise 1984).

LA VILLA AUGUSTEENNE DU CLOS-de-SERRE

LA VILLA AUGUSTEENNE DU CLOS-de-SERRE
C'est sur l'extrémité méridionale de la terrasse sommitale que des murs d'époque romaine ont été signalés et explorés au milieu du XIXe siècle par P. Renaux, en même temps qu'un matériel très abondant et varié était collecté dans les labours : tessons de poterie (du IVe s. av. J.-C. au VIe s. de notre ère), monnaies républicaines et impériales, fragments de plaques ou de colonnes imposantes en marbre, et même une très belle statue acéphale de femme (une déesse ?) en marbre blanc, copie d'un modèle grec, conservée actuellement au Musée Lapidaire d'Avignon. L'ensemble a été interprété à l'époque comme un ensemble de thermes monumentaux.

 

Des fouilles méthodiques mais partielles et des sondages ont été entrepris sur le site (Sautel 1946 ; Dupoux 1956 ; Mouraret 1989-1993) [1]. Quoique gravement endommagées par les travaux agricoles et les prélèvements de pierres, les ruines non visitables n'en demeurent pas moins imposantes. Elles ont révélé l'existence d'une très grande villa d'environ 2500 m2 d'emprise au sol, dont l'occupation – à en juger par le mobilier récolté - s'étend de la conquête romaine en 125 av. J.-C. jusqu'au VIe s. de notre ère, avec deux périodes d'activité particulièrement intense que l'on peut situer à l’époque augustéenne, et aux IIIe et IVe s. de notre ère. A partir des vestiges encore visibles et des résultats des différentes fouilles, le plan, quoique fragmentaire, révèle une très riche demeure étirée d'est en ouest sur une centaine de mètres, orientée au sud-est, posée sur une terrasse consolidée par des exèdres. Une salle de bains, des pièces d'habitation aux murs peints et vraisemblablement pavées de mosaïque ont été clairement identifiées, ainsi qu'un ensemble complexe de chauffage par hypocauste comportant au moins deux foyers (Bouet 1999). Les fragments de marbre, nombreux, rendent compte d'un décor intérieur qui devait être luxueux [2]. A l'extérieur, la décoration comportait des frises de plaques Campana [3]qui indiquent que l'occupant de la villa a importé ses goûts et habitudes directement de Rome. Le site de Caumont-sur-Durance est à l'heure actuelle le seul de toute la Gaule à présenter la mise en œuvre de ce type de décor [4].

 

SPAN>L'absence d'indices témoignant d'une activité agricole permet d'affirmer que l'on est en présence d'une demeure rurale à caractère purement résidentiel, assez luxueuse pour héberger un magistrat de haut rang, sans doute romain de souche. Elle sera ensuite occupée jusqu'au VIe s. de notre ère, preuve supplémentaire de son importance. On ne peut que regretter que ces vestiges aient été négligés pendant des siècles, ne nous en laissant aujourd'hui que de trop maigres traces. Mais cette richesse a heureusement laissé d'autres témoins que des découvertes récentes ont permis de mettre au jour.

 

 


 

[1] Pour J. Sautel et J. Dupoux, s'il y a bien eu un compte-rendu assez succinct de leurs travaux, il n'y a en revanche aucun rapport détaillé au sens où on le conçoit aujourd'hui.

 

[2] La statue découverte au XIXe siècle, citée plus haut, le laissait déjà supposer.

 

[3] Plaques de terre cuite moulée et peinte, ornées de motifs mythologiques ou apotropaïques, disposées en frise sur les façades. Leur diffusion hors de la proche région de Rome est très exceptionnelle.

 

[4]Plusieurs fours ayant fabriqué de telles plaques ont pourtant été identifiés, dont un découvert récemment par D. Carru à Mazan.

 

UN JARDIN D’AGREMENT SOMPTUEUX D'EPOQUE AUGUSTEENNE

UN JARDIN D’AGREMENT SOMPTUEUX D'EPOQUE AUGUSTEENNE
L'espace aménagé

C'est en effet sur la terrasse inférieure la plus proche du niveau de la Durance, en contrebas de la villa, qu'un projet immobilier a donné l'occasion de fouiller en 1999 et 2001 [1] cet espace dont la superficie totale est voisine d'un hectare et demi.

C'est tout d'abord un mur de clôture fermant un rectangle de 120 m sur 90 m qui est apparu, relativement bien conservé sur deux de ses côtés. D'une hauteur attestée de près de 3 mètres, il est construit en gros moellons de calcaire local liés au mortier de chaux, la face tournée vers l'intérieur du jardin parementée en opus reticulatum  (les moellons, taillés en “ grain de maïs ” mesurent entre 6 cm et 8 cm de côté). Bien que renforcé à l'ouest (côté talus) par au moins six exèdres, ce mur s’est effondré par pans entiers à une époque difficile à déterminer, à cause d'une fondation manifestement trop sommaire. Il a été reconstruit lors d'une deuxième phase d'occupation des lieux, selon une technique plus classique d'opus vitatum, non sans être renforcé par sept piliers disposés à intervalles plus ou moins réguliers. Le parement réticulé permet de dater la construction originelle car on ne l’observe essentiellement, dans le monde romain,  qu'entre le 1er s. av. –J.-C et le 1er s. de notre ère. Fréquent en Italie centrale et Campanie, il est très rare en Gaule continentale [2] : le mur de Caumont-sur-Durance est ainsi le seul exemple connu de mise en œuvre de ce type de parement dans un domaine privé, en Gaule. De plus, il nous autorise à conclure que cette clôture est contemporaine de la villa d’époque augustéenne du Clos-de-Serre, avec laquelle il doit être mis en relation.

Vers l'ouest, les vestiges du mur étaient encombrés par une accumulation de mobilier très hétérogène qui évoque un dépotoir : matériaux de construction, fragments de marbre, débris d'amphores (Dressel 20, Gauloises, Africaines), matériel céramique (sigillée sud-gauloise ou commune) et osseux, datables du 1er au VIe s. av. J. –C. La villa augustéenne a été victime d’une destruction violente, peut-être lors des troubles que connaît notre région vers 270 de n. ère, et l’on s’est débarrassé là d’une partie des ruines.

On est en présence donc, d'un espace rectangulaire clôturé de 90 m de largeur sur 120 m de longueur, d’environ 1,3 hectare de superficie, qui peut être interprété comme un jardin d’agrément. Des sondages diligentés par Philippe Boissinot ont été pratiqués avec, pour objectif principal, la recherche de témoins des plantations antiques. La plupart n'ont livré que des traces très ténues de vigne, mais leur désordre apparent n’a pas permis d'en déduire une organisation logique. En revanche, une recherche plus approfondie conduite sur une zone choisie au sud du bassin (infra) en raison d’une large plaque d’effondrement du mur qui a scellé le sol antique,  une série de petites fosses allongées sont apparues, alignées, parfois flanquées par des trous circulaires plus grands. Ces vestiges sont significatifs de la technique du provignage et de complantation, typiquement italienne, où cohabitent les arbres et la vigne. Une fois de plus, ce mode de mise en valeur du sol fait l'originalité du jardin de Caumont-sur-Durance car, à ce jour, il n’a été observé en Narbonnaise qu’en un seul autre endroit (Les Girardes - chantier TGV) (Boissinot 2001). Ceci n’exclut pas une occupation différente de cet espace au cours des siècles, comme nous le verrons ci-après.

 



[1] Ces fouilles ont été pratiquées par J. Mouraret et D. Carru aux dépens du promoteur du projet immobilier et du Service d'archéologie du Conseil général de Vaucluse.

[2] Givors (aqueduc), Narbonne (horrea), Fréjus (dans un contexte augustéen aussi) en offrent les rares exemples (correspondance J. –P. Adam 1999).

Jardin Partie 2 bassin
Au centre du jardin un bassin monumental

 

Découverte majeure de ces fouilles, un très grand bassin a été dégagé dans l'axe central du jardin. L'occupant de la villa y accédait par paliers successifs grâce à un escalier monumental qui aboutissait, à l'entrée occidentale du bassin, sur une petite esplanade peut-être dotée d'une colonnade autrefois ?

 

Le bassin est impressionnant par ses dimensions. Il est large de 3,20 m, profond de 1,20 m, long de 65 m, entouré d'une margelle en  grandes dalles de pierre soigneusement sélectionnée (calcaire fin d’Oppède). Les murs latéraux ont été élevés en deux temps (interprétation due à J. –M. Mignon). Une première maçonnerie en blocage grossier au mortier de chaux constitue le mur proprement dit, large de 0,60 m. Il résulte du remplissage d’une tranchée creusée au préalable dans le sol, formant le moule du blocage. A ce stade, des saignées verticales d’environ 30 cm de large ont été réservées à intervalles irréguliers sur la face intérieure du bassin, pour jouer le rôle de raidisseurs pour le deuxième mur vers l'intérieur. Ce dernier est fait de fines plaquettes de calcaire liées au mortier maçonnées contre le précédent. En phase finale, deux couches d’enduit d’étanchéité ont été appliquées, complétée par un solin. Le fond du bassin a fait l’objet d’un soin décoratif particulier. Il est en effet composé d’un assemblage en opus spicatum de petites briquettes d’argile cuite (plus de 50 000, moulées à la main) de couleurs variées allant du jaune pâle au brun. La descente dans l'eau du bassin pouvait se faire par cinq marches d’escalier retrouvées en place au coin sud-ouest du bassin.

 

Les couches de sédiment observées à l'intérieur indiquent une courte période durant laquelle le bassin n’est plus entretenu, suivie par une épaisse couche de terre surchargée de débris de toutes sortes qui permettent de dire que le bassin a plus ou moins servi de dépotoir pendant une longue période et qu'il avait en tous cas perdu sa fonction d'agrément. Un lot groupé (une bourse sans doute) de cinq monnaies d’époque constantinienne provenant de la couche inférieure montre qu'au IVe s. le bassin était encore largement ouvert.

 

Au milieu du bassin, à une dizaine de mètres de son entrée, ont été posés deux tambours de colonnes flanqués de dalles récupérées aux dépens de la margelle, posées de chant. L’interprétation la plus vraisemblable de ce dispositif, soit la mise en place d’une passerelle en bois évitant le contournement du bassin, est cependant mise en doute par la découverte récente, près de son accès supposé, d'une aire de foulage d'argile qui en aurait rendu l'usage plus que problématique.

 

Un sondage a été fait à l’extrémité orientale du bassin. On y voit nettement, à l'extérieur, les rainures faites par une pioche lors du creusement de la tranchée  (technique déjà décrite). Au coin nord-est, des traces de mortier sur le fond du bassin suggèrent l’existence d’un escalier d’accès, aujourd’hui disparu. Une bonde permettait la vidange de l'eau ; elle a été arrachée à une époque indéterminée, peut-être pour en récupérer le plomb (elle est en plomb dans la villa de Puissalicon dans l'Hérault) ? Vers l’extérieur du bassin, un canal de vidange de 0,65 m de largeur, en moellons de calcaire maçonnés au mortier de chaux, a été suivi sur une longueur de 2,70 m. Il s’interrompt à la limite de la parcelle voisine (limite qui coïncide avec un talus de 1,50 m environ) et il n’est pas possible de dire à quel dispositif de réception aboutissait ce canal, ni comment l'eau rejoignait la Durance, les labours ayant tout arasé.

 

Un autre petit canal, parallèle au côté nord du bassin, a été découvert à 1,75 m de distance de celui-ci. Fermé par de très grandes dalles de calcaire recouvertes d’un lit de gros galets, de petites dimensions (0,40 m de largeur, 0,58 m de profondeur) et de construction sommaire, il fait office de drain destiné à recueillir les eaux d’infiltration qui auraient pu provoquer des désordres dans la maçonnerie du bassin. A l'inverse, en dépit de recherches approfondies en amont du bassin, il n’a pas été possible de retrouver son système d’alimentation en eau (peut-être en bois ?).

 

Le bassin est le vestige le plus remarquable du site. Ses dimensions exceptionnelles surprennent. On n’en retrouve d’équivalent nulle  part ailleurs dans les Gaules (les bassins de Plassac, Puissalicon, Tourves, Taradeau…sont tous plus petits). Seul celui de Welschbillig (près de Trèves) supporte la comparaison avec ses 58 m de long, et 18 m de large. En Italie, à Pompéi, la maison de D. Octavius Quarto était pourvue d’un bassin de 49 m (sur 1,33 m de large seulement), mais celle de Papiri alignait un plan d’eau de 66 m de longueur, sur presque 7,50 m de largeur. A Caumont, le pavement du fond, pour être de technique relativement courante (maison au dauphin à Vaison, pour n'évoquer qu'un exemple proche), n’en demeure pas moins impressionnant par la somme de travail qu’il représente. C’est bien l’inspiration d’un modèle italien qui a présidé à l'aménagement de l’ensemble du jardin (les murs réticulés sont typiquement italiens eux aussi). Sa position dans l’aménagement paysager n’est pas fortuite non plus : situé dans l’axe de symétrie présumé de la villa, perpendiculairement à sa façade, il participait de façon particulièrement spectaculaire à une mise en scène monumentale du domaine, par ailleurs judicieusement implanté dans la perspective de la route qui reliait la via Domitia à Avenio à partir de La Tour-de-Camp (Robion). Ce constat incite à suggérer - les exemples italiens y encouragent - l’existence d’une entrée sous portique pour le bassin proprement dit, intégrée dans un décor tout aussi monumental de l’ensemble du mur ouest du jardin avec ses exèdres [3].

 

 


 

[3] Quatre tambours ont été exhumés vers l’entrée du bassin au XIXe s. (dont un conservé dans l'église paroissiale de Caumont). Ils s'ajoutent aux deux que nous avons signalés à l'intérieur du bassin. En outre, la fouille a livré partout un très grand nombre de secteurs de colonne en pierre locale (habituellement en brique), qui confortent l’hypothèse d’un portique.

 

Jardin Partie 3 (funéraire)
Dans le jardin, un espace funéraire

Un sondage a révélé en 1999, à l'intérieur du périmètre du jardin, un espace à vocation funéraire, sans que l’on puisse affirmer avec certitude qu’il s’agit bien d’un enclos à proprement parler. Une aire de crémation fortement chargée en cendres et en charbons est bien délimitée par deux alignements de moellons (1,60 m sur 0,70 m). Tout contre, ont été récoltés les fragments d’une urne (reconstituée) en céramique indigène non tournée, noire, à col lissé (fin 1er s. av. J. –C./début 1er s. de n. è). A proximité, les restes d'une sépulture à incinération ont été retrouvés dans un coffre de dalles carrées (deux d'entre elles, moulurées, semblent avoir été prélevées dans les rebuts provenant de la construction de la villa ou du bassin), qui renfermait parmi les cendres : des fragments de fer très oxydés (non identifiables), quelques fragments de céramique des « ateliers des Alpilles » (fin 1er s. av. J. –C./début 1er s. de n. è) et d’une amphorette en pâte jaune clair, ainsi que quelques esquilles d’os. Le mobilier renvoie donc à une période que l’on peut situer entre 50 av. J. –C. et 50 de n. ère La contemporanéité de cet espace funéraire et du jardin d'agrément suggère que l'un des esclaves chargés de l'entretien du jardin ont pu bénéficier du privilège d'y être enterrés [4].

L'extension de cette fouille en 2003 a révélé des structures bâties dans lesquelles l'espace funéraire est imbriqué. Plusieurs murs en moellons montés à l’argile de façon plutôt fruste forment un bâtiment assez vaste, de 280 m² d'emprise au sol, pourvu de portes et alimenté par une canalisation d'eau. Il n’a pas été possible de conduire les investigations à leur terme pour aboutir à une interprétation sûre de cette construction. La fouille de ces vestiges a livré des fragments de céramique grise monochrome ("Phocéenne"), de céramique des "ateliers des Alpilles" et de doliums, mais aucun fragment de vaisselle de luxe, ce qui donne à penser que l'on est en présence d'une exploitation agricole modeste, installée à proximité de la Durance, antérieure à l'aménagement du jardin qui l'a fait disparaître.

 



[4] Pratique explicitement mentionnée dans un document dit "le testament du Lingon". Renseignement aimablement communiqué par Philippe Leveau.

UNE FONCTION NOUVELLE DE L'ESPACE AU IVe s. de n. ère

Il est difficile de dire pendant combien de temps le jardin a rempli sa fonction de lieu d'agrément, mais il paraît très probable qu'elle a été d'assez courte durée. En tout état de cause, les troubles qui ont affecté la Narbonnaise dans la deuxième moitié du IIIe s. de n. è. ont entraîné une destruction partielle de la villa et l'on peut supposer que, du même coup, l'entretien du jardin en a beaucoup souffert, s'il n'avait pas déjà été purement et simplement  abandonné en tant que tel auparavant. Cependant les vestiges d'une occupation nouvelle de l'espace ont été retrouvés.

 

Ainsi, près du bassin, au nord de celui-ci et appuyé contre un contrefort du mur ouest de clôture du jardin, un petit établissement thermal privé (très détérioré) a été entièrement dégagé en 2001. Il a vraisemblablement remplacé les bains détruits de la villa. Il comporte un foyer extérieur établi dans une cour placée devant la grande exèdre [1]. L’air chaud était canalisé vers un caldarium pourvu d’un sol de béton et de pilettes d’hypocauste en briques. De là il passait vers un tepidarium dont la suspensura a été partiellement conservée, posée sur des pilettes, en briques pour certaines, en petites colonnettes de récupération en calcaire pour d’autres. Le chauffage était complété par des tubuli dont quelques exemplaires ont été retrouvés en place. Une petite baignoire placée entre la pièce froide et la pièce chaude complétait cet ensemble que des monnaies d’époque constantinienne permettent de bien dater du IVe s.

 

Fait inattendu, une inhumation a été pratiquée entre les pilettes du caldarium [2]. Il s’agit d’un coffre de lauzes grossières en bâtière, qui abritait le squelette bien conservé d’une femme très âgée reposant tête au sud, sans dépôt funéraire. La typologie de cette tombe laisse supposer que cette inhumation a été pratiquée au plus tôt vers le début du Ve siècle, ce qui indique que l'installation thermale était abandonnée à cette époque.

 

 


 

[2] Pour être complet,signalons qu'une inhumation de nouveau-né en amphore Africaine (IVe s. de n. ère) a été retrouvée entre l'aire de foulage et le four de tuilier. Il est très vraisemblable que cette tombe doit être mise en relation avec ces artisans.

  

UNE FONCTION NOUVELLE DE L'ESPACE AU IVe s. de n. ère (suite fours)
Des fours de potiers
Il est plus difficile d'admettre la présence de plusieurs fours d'artisans, construits à proximité de l'installation thermale (supra) et à la même époque qu'elle, sachant les nuisances peu souhaitables que leur activité ne devait pas manquer d'occasionner …

 

Un premier four a été repéré sur le site dès 1989, encastré au pied du talus ouest. Les fouilles de 1999 ont permis une meilleure connaissance de ce four et la découverte de l’atelier annexe (adossé au mur d’enceinte du jardin - 14 m de longueur et 7,40 m de largeur). Les vestiges d’une aire de décantation de l’argile et un conduit de chauffe pouvaient se lire sur le sol. La fouille du four n’a pu se faire que très partiellement en raison de divers obstacles insurmontables. Il a tout de même été possible de reconnaître sa forme rectangulaire et trois murettes en briques de l’alandier qui supportaient la sole (non retrouvée). Seule la largeur du four a pu être mesurée avec précision : 2,50 m. Son remplissage n’a livré que des fragments d’imbrices et de tegulae et aucune trace de rebuts d’autres types de poteries. On est donc en présence de l'officine d'un tuilier. Le sol de son atelier a livré un mobilier très pauvre et très hétérogène que l’on peut attribuer en partie à des apports extérieurs accidentels : céramique commune, Claire A, Culinaire africaine, DSP. Une série cohérente d’une vingtaine de monnaies constantiniennes a été récoltée, qui permet de proposer le milieu du IVe s. pour l’activité de ce four. Parmi celles-ci on retiendra (identification due à D. Carru) : 

 

- petit bronze imitation indigène de monnaie de Constance II (340 – 345)

 

avers : tête diadémée, à droite revers : la louve allaitant Romulus et Remus

 

- petit bronze de Constantin II (337 – 340)

 

avers : tête diadémée, à droite  . CONSTANTINVS IVN NOB CAES

 

revers : victoire ( ?) marchant à gauche, tenant un globe en main gauche. illisible

 

- petit bronze de Constant Ier (337 – 350)

 

avers : tête diadémée à droite . CONSTAN.S PF AVG

 

revers : enseigne entre deux soldats  VICTORIAE DD AVGEQNN

 

- petit bronze de Constant Ier (337 – 340) identique au précédent

 

- petit bronze à l’effigie de Théodora, 2e épouse de Constance Chlore (305 – 306)

 

avers : tête de femme diadémée, à droite . illisible

 

revers : la paix debout, à gauche . PAX PV(BLICA ?)

 

 

Le second four a été observé en 2001, à une douzaine de mètres plus au nord, mais il n'en reste que des vestiges très ténus. Sa construction est en tous points identique au précédent : des murettes de briques supportant la sole, et une maçonnerie extérieure élevée avec les mêmes matériaux. Il se trouve encastré dans le talus comme lui et il est de même entouré de fragments de tuiles. Malheureusement, il n'a livré aucun indice de datation pertinent. Tout donne à penser qu’il s’agit vraisemblablement du même artisan qui a été amené à reconstruire son four, le premier étant hors d'usage à la suite d’un incident quelconque. L’éventualité d’un deuxième artisan actif sur le même site n’est cependant pas à exclure.

 

 

Le troisième four dégagé en 2004 en bordure sud du bassin à l'occasion du réaménagement (actuel) du jardin présente un intérêt particulier en raison de son état de conservation assez rare. Il s'agit ici du four circulaire en argile (1,45 m de diamètre) d'un potier qui a fabriqué de la céramique commune à pâte claire retrouvée en abondance à l'intérieur et autour du four. La sole a été reconnue, effondrée sur place, déformée – semble-t-il – par un "coup de chaleur" ? A quelques mètres de là une grande aire de décantation de l'argile (4,28 m x 2,95 m), compartimentée, a été identifiée. Elle est sans doute à mettre en relation avec ce four, mais peut-être aussi avec celui du tuilier, si même il ne s'agit pas d'un seul et unique artisan. Il s'agit d'un grand quadrilatère délimité par des cloisons faites à l'aide de tegulae dressées de chant selon une pratique assez courante dans le monde romain. Une monnaie constantinienne trouvée à l'intérieur permet de placer l'hypothèse de datation de cette officine, comme les deux précédentes, au IVe s de n. ère.

 

Les investigations dans l'espace du jardin n'ont livré aucun dépotoir de rebuts de cuisson qui n'auraient pas manqué de s'y trouver si l'on avait eu affaire à une officine exportatrice, ou en tous cas de grande diffusion. Cela paraît indiquer une production essentiellement domestique, répondant aux besoins immédiats du domaine du Clos-de-Serre [2].
       

 

Si l'on fait abstraction des vestiges urbains qui relèvent de la monumentalité des cités romaines de notre département (Orange, Vaison-la-Romaine), le site du Clos-de-Serre à Caumont-sur-Durance s'avère être d'une importance archéologique primordiale parmi ceux que l'on connaît à ce jour dans le Vaucluse. On ne peut que regretter que le travail de P. Renaux en 1844 n'aient pas fait l'objet d'un compte-rendu détaillé , et tout aussi regrettable que des maisons aient été édifiées dans un proche passé au milieu des ruines de la villa, interdisant une fouille exhaustive qui permettrait d'en établir un plan complet et d'en donner une description plus précise. On sait au moins que le décor de cette dernière comportait – fait unique en Gaule à l'heure actuelle, comme nous l'avons déjà relevé - des plaques Campana. Par chance, le village de Caumont s'est déplacé dès le Moyen Age à quelques centaines de mètres de distance, épargnant ainsi le jardin et son bassin, permettant aujourd'hui de remettre au jour un ensemble dont on ne connaît aucun autre équivalent. Bonheur supplémentaire, la réutilisation de cet espace au IVe siècle., soit pour compléter l'équipement thermal de la villa, soit par des artisans potiers, n'a pas entraîné de destructions massives que l'on aurait pu craindre.

 

 

Enfin, nous n'avons actuellement aucune indication permettant d'identifier nommément le propriétaire romain de la demeure du Clos-de-Serre. Selon Grégoire de Tours, au VIe s. le roi de Burgondie Gondran aurait attribué à son patrice Mummole un important domaine nommé Machovilla situé "dans le territoire d'Avignon", domaine qui fut ruiné par les Lombards lors de leur passage inamical dans notre région en 574. Si sa localisation exacte demeure encore controversée, nous reprenons volontiers à notre compte l'hypothèse brillamment étayée dans les Annales d'Avignon et du Comtat par E. Duprat (Duprat 1916) qui place Machovilla au Clos-de-Serre. Au moins saurions-nous ainsi le nom de son héritier du VIe siècle. ?

  

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